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IL ETAIT UNE FOIS 1720

Publié par Festival Historique

19 mai 1720. Le temps est beau. Le Grand Saint-Antoine quitte Livourne. Marseille est à quelques jours de voile. On imagine le moment où les portefaix vont tirer de la cale du vaisseau les marchandises. Les marins songent déjà aux retrouvailles familiales.

20 mai 1720, François Lion, matelot à bord du vaisseau, se détourne des tâches de l’équipage, il est malade.

Jean-Baptiste Chataud ne profite pas du convoi qui rallie Marseille le 21 mai. De nouvelles instructions sont nécessaires et pour cela il décide de relâcher, une seconde fois, au Brusc. Il attend la réponse des propriétaires.

Elle ne tarde pas : «... sur ordre précis et sur garanties, il  se mit à la voile pour les îles de Marseille ».

Le vent le pousse et l’accompagne vers l’île Verte qui accroche le mistral et met la baie de La Ciotat à l’abri de la violence des tempêtes. Le Bec de l’Aigle. Hautaine et majestueuse, la falaise plonge dans la mer annonçant l’ébauche d’une côte familière. Les îles de Marseille sont proches : Riou, Plane, Jarre, et au détour de Maïre, à l’horizon, la rade de Marseille, l’archipel du Frioul et le château d’If.

Lorsqu’ils fondèrent Marseille, les Phocéens introduisirent l’usage des farots. Ces feux de garde parsemèrent la côte maritime provençale. C’étaient des tours situées sur différents points élevés du littoral, à l’entrée des ports ou des embouchures des rivières. Un feu allumé sur le haut de la tour guidait les navires dans leur route pendant la nuit. Cette tradition demeura. C’est ainsi que le Grand Saint-Antoine devine dans le lointain des côtes les fanaux de La Cadière, La Ciotat, Riou, Marseilleveyre et Planier. Ces vigies permettent de « faire des signaux de feux afin que répondant les uns aux autres, on puisse être partout averti en peu d’heures des lieux où seront les vaisseaux et les galères des ennemis. C’est également un moyen de communication qui, selon des messages convenus, donne en l’espace d’une demi-heure des nouvelles d’une extrémité de la Provence à l’autre. Pendant le jour, des signaux de fumée révèlent l’approche ou le passage des navires. On fait brûler du bois vert et humide et l’on jette dessus des poignées de poudre, une poignée de poudre par bâtiment aperçu. Pendant la nuit, des signaux de feux indiquent autant de foyers qu’il y a de voiles. On brûle à cet effet les fruits (badasses) des cyprès sauvages et du bois sec. De vigie en vigie, ce matin-là, une fumée dense et blanche s’est élevée dans le ciel pour signaler la venue du Grand Saint-Antoine.

Au début de l’après-midi, le navire déborde l’îlot d’If et s’approche de l’archipel du Frioul. Cette grappe d’îles et d’îlots fait face à la côte marseillaise.

À 6 milles dans le sud-ouest du port de Marseille, l’île de Pomègues est suffisamment éloignée pour avoir été retenue depuis 1627 comme un lieu unique de quarantaine des navires, et suffisamment proche pour que l’on y sache tout ce qui s’y passe. Elle s’étire sur plus d’un mille (2 km), falaises lacérées par la brutalité des pluies et la violence des vents, calanques aux eaux claires, massif rocheux de calcaire blanc. La végétation semble, à première vue, inexistante ou pauvre. Quelques figuiers et oliviers survivent à la violence des souffles marins. L’île de Pomègues cache dans un enfoncement de la côte est un abri naturel, une calanque de 2 hectares appelée port de Pomègues.

ARRIVEE A MARSEILLE

25 mai 1720 - Le Grand Saint-Antoine doit annoncer son arrivée par un signal suivant la nature de sa patente. La règle : un coup de canon pour faire connaître au capitaine de l’île qu’elle est « nette » ; deux coups de canon pour informer qu’elle est « brute » ; deux coups de canon, de même, pour préciser que les certificats de santé sont « nets », mais qu’il y a eu pendant le trajet des malades suspects de contagion.

Le port de Marseille refuse les navires en provenance directe du Levant et de Barbarie. La peste épouvante toujours, des mesures strictes sont observées pour prévenir le mal, le tenir à l’écart, et lorsqu’il se manifeste, pouvoir s’en protéger.

Un Bureau de la Santé

Un arsenal de textes administratifs échafaudés depuis presque un siècle - arrêts du parlement d’Aix, ordonnances royales et mémoires divers - fixent les modalités d’organisation du complexe sanitaire marseillais, dans un espace triangulaire délimité par le port, le lazaret et l’île de Pomègues. Surveillance, discipline et protection, tels sont les rôles fondamentaux du Bureau de la Santé de Marseille. On lui attribue également une mission de communication avec tous les pays du bassin méditerranéen.

Le Bureau de la Santé de Marseille, en 1720, comprend seize intendants choisis parmi les négociants les plus anciens et expérimentés, ceux qui ont résidé longtemps au Levant ou en Barbarie. S’ajoutent quelquefois trois ou quatre anciens capitaines de vaisseaux marchands. Pour être élu, il faut être âgé de plus de quarante ans, sans toutefois aller au-delà de soixante- dix ans, et « être en état d’agir ». L’élection des intendants a lieu chaque année le 29 octobre. Le 2 janvier de l’année suivante, ils entrent en fonction. Deux intendants sont trésorier des deniers  et contrôleur des dépenses et quatre autres sont auditeurs des comptes. L’intendant semainier fait exécuter ce qui est ordonné lors des délibérations du Bureau. Il est en contact avec les capitaines de navire qui vont faire leur quarantaine ou qui la terminent. Les autres intendants occupent les postes de direction et d’inspection … des eaux, des bateaux de service et de garde ou de la composition et distribution des « parfums »... Pour l’accompagner dans ses tâches diverses, on trouve un secrétaire-archivaire, deux capitaines, un commis des archives, deux valets, un garde du port de Pomègues, un patron et deux mariniers pour le bateau de service. La surveillance des navires et des équipages effectuant leur quarantaine dans le port de Pomègues est exercée par trente gardes, un ou plusieurs placés à bord.

Extraits: Un homme, un navire, la peste de 1720 - Michel GOURY

19 - GRAND SAINT ANTOINE - LE DERNIER VOYAGE – RETOUR AU BRUSC ET ARRIVEE A MARSEILLE
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